• Les bonnes recettes venues d’ailleurs

    Education : à l’école des autres

    En France, un jeune sur cinq décroche de l’école en cours de route et sort sans diplôme.De quoi remettre en question notre politique de l’éducation et nos méthodes pédagogiques! A quelques jours de la rentrée scolaire, Caroline Brizard et Véronique Radier ont voulu savoir comment s’en tiraient les autres. Un tour d’horizon à la fois surprenant et éclairant

    Sans cesse réformée mais toujours convalescente, l’école française va mal. Elle reste une énorme machine, d’un modèle dépassé, où les rouages s’épuisent sans grand résultat. Une école de fous où les enseignants, souvent démoralisés, dépassés, ne savent plus comment remplir leur mission. Où, selon l’OCDE, nos ados détiennent le record de la souffrance au travail. Et pour quel résultat? L’échec scolaire est massif. Chaque année, 150000 jeunes décrochent sans diplôme en poche, soit plus d’un sur cinq! Et ce sont les victimes les plus visibles du système. Mais il y en a bien d’autres. L’obsession de la sélection, de la compétition, l’ambiance de travail souvent oppressante et des méthodes punitives qui n’ont parfois guère changé depuis un siècle fragilisent des cohortes d’enfants et d’ados.
    Et ceux qui croient qu’elles sont le prix nécessaire à payer pour réussir mieux que les autres se trompent. Les évaluations internationales très fiables menées par l’OCDE (voir encadré p.43) permettent depuis peu de comparer le niveau scolaire des jeunes à travers le monde. Or la France n’a pas de quoi plastronner. Le Canada, la Finlande, l’Australie, le Japon, les Etats-Unis mais aussi la Corée ou la République tchèque font bien mieux que nous. Coup dur pour l’orgueil national, nos élèves sont tout juste moyens. Pire: notre école gratuite, laïque et républicaine se révèle particulièrement injuste. Plus qu’ailleurs elle calcifie les inégalités sociales. Foi d’Insee, jamais il n’a été aussi difficile pour un Kevin de la Cité des 4000 de s’asseoir sur les bancs d’une grande école, jamais il n’a autant couru le risque de pointer au chômage.
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    <script language=JavaScript></script> <script language=JavaScript1.1></script> <script language=JavaScript></script> Injuste, élitiste, notre système scolaire est de surcroît absurdement malthusien. Les guerres économiques d’aujourd’hui se livrent à coups de neurones. Et tous les pays se battent pour élever leur niveau de qualification. Chez nous, la sélection à outrance, le gaspillage des talents ferment la porte des études à trop de jeunes. 37% seulement d’une génération accède à l’enseignement supérieur contre 75% en Suède par exemple et 51% en moyenne parmi les pays de l’OCDE. Peut-être même peut-on attribuer aux effets de cette sélection par l’échec, dont la France est la championne, une certaine morosité qui caractérise la société française? Telle est la thèse défendue par Patrick Fauconnier dans son livre «la Fabrique des "meil-leurs"»(1). Vu de l’étranger, c’est encore plus criant. Pascal Baudry, psychanalyste et chef d’entreprise qui vit entre la France et les Etats-Unis, dénonce «un système malade et délétère que celui où chacun se situe d’abord par rapport à ce qu’il n’a pas réussi» (2). D’ailleurs, dans la dernière enquête de l’OCDE, à la question «vous sentez-vous bien en classe?», moins d’un jeune Français sur deux répond «oui». C’est le plus mauvais score des 41 pays sondés.
    Il faut bien l’admettre. D’autres font beaucoup mieux que nous – Finlande, Canada, Royaume-Uni, etc. – avec des méthodes moins brutales. A l’heure où notre ministre de l’Education hésite encore à lancer son train de réformes, quelles leçons peut-on tirer de leurs expériences? Voici les recettes fondamentales de pays où l’école marche bien. La preuve par l’exemple.


    1. Etats-Unis, Canada : la confiance en soi, clé de la réussite

    Chez nous, l’idée qu’apprendre est avant tout un effort, et qu’il faut souffrir pour s’élever jusqu’au savoir, semble une évidence. «Notre école reste aujourd’hui encore fondée sur un système punitif où c’est à l’élève d’être digne de recevoir l’enseignement et non à l’école de l’encourager», explique Maurice Porchet, professeur de biologie à l’université de Lille et auteur de plusieurs rapports sur l’enseignement des sciences. Pour nous, l’élève en échec est celui qui ne travaille pas assez. Il ne peut s’en prendre qu’à lui-même. A l’inverse, au Canada, aux Etats-Unis ou encore dans les pays nordiques, les connaissances doivent être mises à la portée de tous. C’est la mission première des enseignants: permettre non seulement aux bons élèves mais aussi à ceux qui ont plus de difficultés d’apprendre. Avec la conviction profonde que tout le monde peut y arriver. «Pour les enseignants, les parents, l’immense majorité des jeunes possède la capacité de réussir», constate Robert Crocker, chercheur en sciences de l’éducation. Or les travaux de l’OCDE montrent que la confiance en soi est un facteur clé de la réussite. L’élève doit avant tout croire en ses propres capacités, et pour cela il a besoin des adultes qui l’entourent. «Nos enseignants savent combien, pour la réussite de leurs élèves, une bonne image de soi est essentielle. Ils s’efforcent en permanence de les encourager», assure Jennifer Lawley, principale du lycée Ross Sheppard à Edmonton, dans l’Alberta (Canada). «C’est un climat, une attitude générale», explique Robert Crocker. Quiconque a déjà mis les pieds dans une école américaine le sait bien, l’encouragement y est permanent, caricatural sans doute à nos yeux. «Les enseignants ne font que des commentaires positifs et pratiquement pas de critiques», raconte ainsi Pascal Baudry. La confiance, moteur de la motivation et de la réussite, se construit grâce à un certain état d’esprit mais aussi grâce à un ensemble de pratiques: l’encouragement systématique à prendre la parole devant les autres, l’apprentissage de l’écoute et du respect mutuel.


    2. Canada : en finir avec la note qui tue


    Imaginez un prof de maths qui ne noterait jamais un élève au- dessous de 12 sur 20? On dirait qu’il est laxiste, qu’il n’a pas d’autorité. Les parents inquiets penseraient qu’il fait mal son boulot. En France, estime-t-on, savoir mettre une mauvaise note, c’est montrer qu’on est un prof attentif et juste, et qu’on connaît son monde. «Une pratique calamiteuse», dénonce André Antibi, mathématicien, directeur du laboratoire des sciences de l’éducation de l’université Paul-Sabatier, à Toulouse, et auteur d’un livre, «la Constante macabre» (3). Après quinze ans d’enquête auprès de centaines d’enseignants, il a constaté qu’invariablement le professeur distribue les copies qu’il corrige, quel que soit le niveau de la classe, en trois paquets, les bonnes, les moyennes et les mauvaises. Pire: que le professeur met inconsciemment au point des astuces pour que les notes de ses élèves s’étalent bien autour d’une moyenne de 10. C’est une «constante». Elle est «macabre» en ce qu’elle casse et désespère les élèves en pure perte. En ce qu’elle fabrique de l’échec inutile. Cette pratique typiquement française révèle bien l’idée que les professeurs se font d’eux-mêmes et de leur mission: ils sont là plus pour sélectionner et punir que pour accompagner. «Or rien n’encourage mieux les élèves que de réussir», martèle Philippe Joutard, historien, spécialiste de la pédagogie anglo-saxonne.
    Que propose André Antibi? De s’inspirer de nos voisins outre-Atlantique pour établir comme chez eux des contrats de confiance avec les élèves. «Les devoirs sont basés sur des objectifs précis et des grilles de correction transparentes. On élimine les pièges, on liste précisément ce qui peut tomber, les exercices corrigés en classe et les questions censées être maîtrisées. Résultat: les élèves travaillent plus, sans stress, parce qu’ils savent qu’ils peuvent tous décrocher une bonne note.» On imagine déjà les avalanches d’objections! Mais quelques lycées en France le pratiquent déjà. Et ça marche…


    3. Finlande : les profs aux commandes

    Ils ont osé! Dans les années 1970, le système éducatif en Finlande était encore strictement centralisé, à l’instar du nôtre. Le ministère de l’Education était une grosse machine qui contrôlait tant bien que mal les milliers d’établissements scolaires du pays. Ça coûtait cher et c’était inefficace. En trente ans, le pays a donc opéré une révolution copernicienne. Le ministère de l’Education a perdu 90% de ses fonctionnaires. Il a licencié ses gestionnaires, ses inspecteurs et ses comptables, ne conservant que les experts chargés de l’élaboration des programmes et des décisions stratégiques. Aujourd’hui, le pouvoir est confié aux soutiers, les professeurs, en bonne intelligence avec l’administration locale. «Nous négocions notre budget avec la commune, nous embauchons nos professeurs, nous nous chargeons d’ajuster les programmes nationaux en fonction de notre environnement», explique Päivi Virén, une directrice d’école à Helsinki. Des profs bac+5 sélectionnés pour leurs compétences mais surtout pour leur talent de pédagogues. Chez nous, les qualités pédagogiques sont quasiment hors sujet. Les concours sont académiques, avec des épreuves théoriques. Une petite année de formation tout aussi théorique et on expédie les jeunes profs frais émoulus dans les établissements les plus durs, advienne que pourra, chacun pour soi.
    En Finlande, la décentralisation a bouleversé les habitudes. Le travail en équipe est devenu la règle. La salle des profs, avec les bureaux de l’administration, est un lieu confortable, une grande salle avec des fauteuils, des plantes vertes, une cuisine, des vestiaires, un vrai quartier général où se prennent, collégialement, les décisions qui régissent la vie de l’école. «L’équipe pédagogique est responsable de la bonne marche de l’entreprise», résume Irmeli Halinen, au ministère de l’Education. L’après-midi, quand les élèves n’ont plus cours, les adultes se retrouvent là, en groupes à géométrie variable, pour régler tout ce qui a trait à la vie de l’école: au hasard, la progression sur l’année des séances du professeur de biologie, le choix d’un nouveau manuel d’histoire ou l’analyse des évaluations des élèves que leur transmet une fois par an le ministère de l’Education. «Nous n’inspectons pas les écoles, rappelle Irmeli Halinen. Nous comptons sur le sérieux des équipes pour faire le nécessaire si les résultats des élèves ne sont pas bons…» Faire confiance aux élèves, faire confiance aux profs.


    4. Canada : garder les élèves ensemble le plus longtemps possible


    Notre collège unique a trente ans cette année, il n’est toujours pas accepté. Il est en procès à chaque rentrée, avec l’idée que tout le monde n’est pas fait pour l’enseignement général. Pourtant, les travaux de l’OCDE le démontrent, les pays où le niveau général est le meilleur sont ceux qui gardent leurs élèves dans un cursus unique le plus tard possible. «Un tronc commun, parfois même jusqu’au bac comme dans les pays nordiques, produit les meilleurs résultats», assure Bernard Hugonnier, directeur adjoint de l’éducation à l’OCDE de Paris. «A 15 ans, il est bien trop tôt pour juger du potentiel d’un jeune, et sur quels critères?» s’interroge Chester Levine, chercheur au ministère du Travail américain. Croire qu’en «offrant» des voies différentes d’orientation on permet à chaque élève de réussir selon ses moyens est une illusion néfaste. En réalité, les filières différenciées isolent les élèves faibles ou en difficulté qui y végètent. Les élèves moyens progressent peu, seuls les très bons élèves en tirent un petit bénéfice. L’Allemagne, qui plus tôt que nous encore triait ses élèves, vient d’y renoncer au vu de ses médiocres résultats dans l’enquête de l’OCDE. En Finlande, au Canada, champions toutes catégories de cette même enquête, le cursus est vraiment commun jusqu’à 16 ans, voire 18. On ne redouble pas mais, à l’intérieur des classes, les élèves à la traîne bénéficient de soutien individualisé par un prof spécialisé pour rester dans la course et éviter la stigmatisation de l’échec.
    Pendant tout ce temps, on ne sélectionne pas. Les enfants ont donc le temps de se construire, mieux protégés des enjeux de compétition. Meilleur pour leur équilibre futur. Meilleur aussi pour l’ascenseur social. «Plus un système différencie tôt, plus il est inégalitaire», explique Bernard Hugonnier.


    5. Grande-Bretagne : faire confiance à la pratique


    En matière de pédagogie, l’épreuve du feu vaut mieux que cent discours fumeux. Comme le montre la réforme du système éducatif britannique. Jusqu’au début des années 1990, les écoles font ce qu’elles veulent, ce qui autorise tous les écarts. Et tous les retards: le royaume de Sa Majesté est la lanterne rouge des pays de l’OCDE. Il est alors urgent d’intervenir. L’Etat décide donc de reprendre la main. Un: il commence par définir des programmes nationaux et des compétences précises à atteindre, par niveau et par matière. Deux: il impose aux élèves de 7 ans et de 11 ans des évaluations nationales dont les résultats sont publiés école par école. Trois: le ministère de l’Education s’emploie, tel un chalutier en haute mer, à faire remonter toutes les bonnes pratiques des profondeurs du pays, toutes ces leçons qui ont bien marché dans les classes pour les proposer en modèle (voir reportage à Londres). Le ban et l’arrière-ban des chercheurs sont sommés de produire des documents pédagogiques ad hoc. Enfin, clé de voûte du système, l’inspection scolaire est réorganisée. Désormais indépendante, l’OFSTED (Office for Standards in Education) visite les écoles tous les cinq ou six ans. «Une expérience traumatisante», résume Maura Keady, la directrice de l’école John- Burns à Londres. Il faut voir! Pendant trois jours, une poignée de contrôleurs ombrageux passent tout au crible, de l’état des tuyauteries aux prestations des professeurs en passant par l’humeur des élèves et le niveau de satisfaction des parents. Leurs rapports d’une quarantaine de pages sont consultables sur le Net. Ils font la pluie et le beau temps. Car les parents, en Grande-Bretagne, peuvent choisir l’école où ils vont mettre leur enfant. Les professeurs, indignés, avaient commencé par hurler au scandale: «C’était une intrusion dans le sacro-saint domaine de l’autonomie pédagogique», résume-t-on au ministère. Ils ont changé depuis: en presque dix ans, boosté par ce vaste dispositif, le niveau moyen est remonté. En 1998, 63% seulement des élèves de 11 ans maîtrisaient le niveau requis en anglais, ils sont 77% en 2004. En maths, c’est encore plus spectaculaire: la proportion est passée de 59% à 74%.


    6. Canada : apprendre aux jeunes à s’orienter

    En France, nous n’orientons pas les élèves. Les plus chanceux rencontrent une demi-heure un conseiller d’orientation, et la sélection tient lieu d’orientation. Tu échoues, tu dois choisir un métier tout de suite; tu es bon, tu peux attendre. Au Canada, les élèves sont amenés très tôt à construire un projet personnel, à se découvrir une vocation: «Tous les élèves suivent un cours de management personnel et d’aide à la construction de carrière», explique Jennifer Lawlay. Et il ne s’agit pas de s’asseoir passivement face à un adulte. C’est au jeune lui-même de mener l’enquête sur tel métier ou tel domaine qui l’intéresse, en se rendant sur le terrain, en rencontrant des professionnels, le tout sous la houlette d’un enseignant dûment formé. On l’aide à se prendre en main, à dépasser l’angoisse du fameux «mais qu’est-ce que je pourrais bien faire?». Dans une certaine sérénité puisque rien n’est encore joué, les choix interviennent plus tard: «Notre collège, notre lycée sont beaucoup moins compétitifs que les vôtres, il n’existe pratiquement aucune sélection avant la dernière année», explique Robert Crocker. En France, on s’oriente trop tôt et dans le brouillard, comme l’explique Patrick Fauconnier: «En troisième, alors que les jeunes ne connaissent rien des métiers. Ils ne se connaissent pas eux-mêmes.» Nos élèves, comme l’ont montré plusieurs études du ministère, s’informent par le bouche-à-oreille auprès de leurs profs, guère plus informés qu’eux, leurs copains, leurs parents. Les informations sur les métiers, sur l’emploi sont éparses et difficiles d’accès. C’est le règne de la rumeur. Les jeunes Américains ont plus de chance. Le ministère du Travail édite chaque année un énorme ouvrage, le «Occupational Outlook Handbook», ce que l’on pourrait traduire par «guide des perspectives d’emploi». Une bible illustrée et rédigée dans une langue accessible à tous, où l’on trouve tout sur 275 métiers ou groupes de métiers. Statistiques détaillées, descriptions réalistes, conditions de travail, formations y menant, carrières possibles, salaires, adresses et, cerise sur le gâteau, une analyse chiffrée des besoins dans les dix ans à venir. Un vrai best-seller, surtout sur internet: «Nous comptabilisons actuellement 6 millions de connexions par mois, tout le monde s’en sert!», assure Chester Levine.

    Caroline Brizard et Véronique Radier

    (1) «La Fabrique des "meilleurs". Enquête sur une culture d’exclusion», Patrick Fauconnier, «L’histoire immédiate», Seuil, Paris, 2005.
    (2)«Français et Américains. L’autre rive», Pascal Baudry, Editions Village Mondial, 2003.
    (3) «La Constante macabre ou comment a-t-on découragé des générations d’élèves...», André Antibi, Editions Math’Adore, Toulouse 2003.


    Caroline Brizard  Véronique Radier 



    Les systèmes éducatifs au banc d’essai

    Jusqu’ici aucun outil fiable ne permettait d’évaluer l’efficacité de tel ou tel système éducatif, de comparer les méthodes des uns et des autres. Mais depuis peu, c’est possible grâce aux enquêtes de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement économiques). Un vaste programme du nom de Pisa (Programme for International Student Assessment) permet désormais de mesurer les performances des différents systèmes scolaires dans le monde. Il s’agit d’un monumental audit, à la fois très fiable et très détaillé, mené pendant plusieurs mois auprès de 250 000 jeunes de 15 ans, l’âge moyen de la fin de la scolarité obligatoire, de leurs enseignants et des responsables d’établissement. Il offre une estimation du niveau moyen des compétences atteint par les élèves dans chaque Etat. Les tests sont élaborés en commun par un consortium de pays et les élèves sont pris au hasard dans plus d’une centaine d’établissements par pays, eux aussi tirés au sort. Rien n’échappe à Pisa, depuis la longueur de la journée de classe, l’importance des «petits cours», jusqu’au niveau d’intérêt pour les mathématiques, ou encore le sentiment d’être bien préparé pour l’avenir...

     

    Semaine du jeudi 25 août 2005 - n°2129 - Evenement



    1 commentaire
  • Voici un article contre beaucoup de parents et de professionnels de l'enfance protestent.

     Lisez-le afin de vous faire une opinion.

    Vous avez en bas de la page, si vous le désirez, un lien pour signer une pétition.

     

    Le gouvernement prépare actuellement un plan de prévention de la délinquance qui prône notamment une détection très précoce des « troubles comportementaux » chez l'enfant, censés annoncer un parcours vers la délinquance.
    Dans ce contexte la récente expertise de l'INSERM, qui préconise le dépistage du « trouble des conduites » chez l'enfant dès le plus jeune âge, prend un relief tout particulier.
    Les professionnels sont invités à repérer des facteurs de risque prénataux et périnataux, génétiques, environnementaux et liés au tempérament et à la personnalité.
    Pour exemple sont évoqués à propos de jeunes enfants « des traits de caractère tels que la froideur affective, la tendance à la manipulation, le cynisme » et la notion « d'héritabilité [génétique] du
    trouble des conduites ».

    Le rapport insiste sur le dépistage à 36 mois des signes suivants : « indocilité, hétéroagressivité, faible contrôle émotionnel, impulsivité, indice de moralité bas », etc.
    Faudra-t-il aller dénicher à la crèche les voleurs de cubes ou les babilleurs mythomanes ?
    Devant ces symptômes, les enfants dépistés seraient soumis à une batterie de tests élaborés sur la base des théories de neuropsychologie comportementaliste qui permettent de repérer toute déviance à une norme établie selon les critères de la littérature scientifique anglo-saxonne.
    Avec une telle approche déterministe et suivant un implacable principe de linéarité, le moindre geste, les premières bêtises d'enfant risquent d'être interprétés comme l'expression d'une personnalité pathologique qu'il conviendrait de neutraliser au plus vite par une série de mesures associant rééducation et psychothérapie.
    A partir de six ans, l'administration de médicaments, psychostimulants et thymorégulateurs devrait permettre de venir à bout des plus récalcitrants.
    L'application de ces recommandations n'engendrera-t-elle pas un formatage des comportements des enfants, n'induira-t-elle pas une forme de toxicomanie infantile, sans parler de l'encombrement des structures de soin chargées de traiter toutes les sociopathies ?
    L'expertise de l'INSERM, en médicalisant à l'extrême des phénomènes d'ordre éducatif, psychologique et social, entretient la confusion entre malaise social et souffrance psychique, voire maladie héréditaire.
    En stigmatisant comme pathologique toute manifestation vive d'opposition inhérente au développement psychique de l'enfant, en isolant les symptômes de leur signification dans le parcours de chacun, en les considérant comme facteurs prédictifs de délinquance, l'abord du développement singulier de l'être humain est nié et la pensée soignante robotisée.

    Au contraire, plutôt que de tenter le dressage ou le rabotage des comportements, il convient de reconnaître la souffrance psychique de certains enfants à travers leur subjectivité naissante et
    de leur permettre de bénéficier d’une palette thérapeutique la plus variée.
    Pour autant, tous les enfants n'en relèvent pas et les réponses aux problèmes de comportement se situent bien souvent dans le domaine éducatif, pédagogique ou social.
    Cette expertise INSERM intervient précisément au moment où plusieurs rapports sont rendus publics au sujet de la prévention de la délinquance.
    On y lit notamment des propositions visant à dépister dès les trois premières années de leur vie les enfants dont l'« instabilité émotionnelle (impulsivité, intolérance aux frustrations, non maîtrise de notre langue) [va] engendrer cette violence et venir alimenter les faits de délinquance ».
    On assiste dès lors, sous couvert de « caution scientifique », à la tentative d'instrumentalisation des pratiques de soins dans le champ pédopsychiatrique à des fins de sécurité et d'ordre public.
    Le risque de dérive est patent : la détection systématique d'enfants « agités » dans les crèches, les écoles maternelles, au prétexte d'endiguer leur délinquance future, pourrait transformer ces
    établissements de lieux d'accueil ou d'éducation en lieux de traque aux yeux des parents, mettant en péril leur vocation sociale et le concept-même de prévention
    .

    Professionnels, parents, citoyens, dans le champ de la santé, de l'enfance, de l'éducation, etc. :


    - Nous nous élevons contre les risques de dérives des pratiques de soins, notamment psychiques, vers des fins normatives et de contrôle social.


    - Nous refusons la médicalisation ou la psychiatrisation de toute
    manifestation de mal-être social.


    - Nous nous engageons à préserver dans nos pratiques professionnelles et sociales la pluralité des approches dans les domaines médical, psychologique, social, éducatif vis-à-vis des difficultés des enfants en prenant en compte la singularité de chacun au sein de son environnement.


    - Nous en appelons à un débat démocratique sur la prévention, la protection et les soins prodigués aux enfants, dans un esprit de clarté quant aux fonctions des divers acteurs du champ social (santé, éducation, justice) et quant aux interrelations entre ces acteurs.

    Contact :
    contact@pasde0deconduite.ras.eu.org

    Signer la pétition :
    http://www.pasde0deconduite.ras.eu.org/index.php?petition=3&signe=oui


    Voir les signataires :

    http://www.pasde0deconduite.ras.eu.org/index.php?petition=3&pour_voir=oui


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  • Bonjour,

    Le printemps va bientôt arriver et les enfants sont toujours ravis d'avoir des petites bêtes à s'occuper.

    Aussi, si vous connaissez une mare pas loin de chez vous, n'hésitez pas à amener vos enfants observer quels sont ses habitants !

    Vous pourrez à cette occasion en profiter pour ramener quelques têtards dans un bocal avec de l'eau de la mare qu'il faudra renouveler tous les 2-3 jours.

    Les enfants peuvent commencer par dessiner les têtards tels qu'ils les voient. Il faudra ensuite observer, noter et dessiner quand ils verront les pattes arrière apparaître, puis les pattes avant et enfin, la queue se mettre à rétrécir pour obtenir une petite grenouille !

    De même, si vous trouvez une chenille, mettez-la dans un bocal dont le couvercle sera percé, en y ajoutant une feuille de salade. Les enfants auront la surprise de la voir se transformer en chrysalide puis,  s'ils ont  la chance d'être là au bon moment, peut-être pourront-ils assister à la sortie du papillon de son cocon !

    N'oubliez pas de remettre en liberté tout ce petit monde après leur métamorphose !

    Voilà !

     Bonnes observations !


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  • Pourquoi ce choix?

    Certains parents déscolarisent leur enfant en cours d'année parce qu'il s'avère être en souffrance (car trop "lent", ou trop rapide, trop rêveur, ayant perdu confiance en lui et ses capacités) dans le système traditionnel. D'autres n'inscrivent pas leur enfant suite à une longue réflexion sur l'éducation : "l'appétit d'apprendre d'un tout petit lui a permis de marcher, parler, boutonner ses vêtements : le laisser continuer ses apprentissages à son rythme permet de préserver sa curiosité et sa confiance en lui" observe une mère. "Lorsque j'ai vécu aux Etats-Unis, j'y ai rencontré des adolescents jamais scolarisés qui m'ont donné envie de ne pas envoyer mes enfants à l'école ; ils étaient souvent plus autonomes, débrouillards, à l'aise", dit cette mère récemment installée en France.

    Plusieurs tendances                                                

    Plusieurs tendances existent parmi les parents qui ne choisissent pas l'école, dont la démarche est souvent qualifiée d'"école à la maison" ou homeschooling : certains veulent offrir un enseignement stimulant à leur enfant. D'autres ne veulent faire "ni école (puisqu'on suit les demandes de son enfant) ni à la maison (puisqu'il n'y a pas de lieu particulier pour apprendre)" comme le fait remarquer une mère de trois filles : ces derniers préfèrent le terme de unschooling. Entre ces deux façons d'envisager la façon d'apprendre des enfants, une multitude de nuances existe selon les préférences familiales. Certains acquièrent du matériel mais ne l'utilisent guère : "je me suis procuré beaucoup de matériel Montessori, ça me rassurait de l'avoir, mais les enfants m'ont appris à partir de leurs questions à eux" témoigne une mère de trois enfants de 6 à 10 ans. D'autres "s'éclatent en utilisant du matériel inventif conçu sous l'impulsion de familles innovantes et curieuses, comme la méthode de mathématiques des frères Lyons", précise une mère de 6 enfants.

    Aux Etats-Unis, certains homeschoolers mettent également en avant leurs croyances religieuses. Mais contrairement à ce que l'on croit souvent, ce n'est pas tant la crainte de voir abordé l'évolutionnisme à la Darwin qui motive le refus des fondamentalist christians que l'importance pour eux d'une éducation en famille, parfois plus sévère qu'à l'école d'ailleurs. La plupart des Etats d'outre-atlantique ont accepté facilement d'assouplir l'obligation scolaire qui existait avant les années 1970, par respect des choix individuels de chacun.

    Quels reproches font-ils à l'école?

    "La question ne se pose pas en ces termes" s'agacent certains : beaucoup de parents rencontrés ne veulent pas se positionner par rapport à l'école. Ils affichent certes une philosophie éducative différente, mais leur choix n'est pas contre l'école.

    Néanmoins, certains formulent des reproches précis et locaux concernant l'école de leur quartier : ils parlent de la violence de la cour de récréation, du bruit, du nombre important d'enfants par classe qui leur semble empêcher une relation de qualité avec l'enseignant. La plupart regrettent la faible place faite aux parents par l'école : ils ne veulent pas confier leur enfant 6 ou 8h par jour à quelqu'un qu'ils n'ont pas choisi et avec lequel ils ne peuvent guère interagir.

    Certains vont jusqu'à critiquer l'institution scolaire en elle-même, en ce qu'elle habitue les enfants à être passifs face au savoir puisque c'est le maître qui enseigne un programme conçu sans les élèves. "Les enfants apprennent d'autant mieux qu'on ne leur enseigne pas" témoigne cette mère de trois enfants de 25, 21 et 15 ans jamais scolarisés. "Lorsque vous posez une question, vous êtes en train d'enseigner ; lorsque l'enfant pose une question, il est en train d'apprendre", dit un père. Ces parents critiquent les notations : ils estiment que l'enfant n'a pas besoin de ces carottes et bâtons artificiels pour grandir puisqu'a été préservé son désir spontané d'apprendre. Ils ne veulent pas de la course à la performance qu'implique l'école qui, pour les plus critiques, est le fondement de la course à la consommation de notre société, via frustrations et prescriptions extérieures à soi.

    Pourquoi ces parents n'ont-ils pas choisi une "école différente" (Montessori, La Source, etc., cf. http://ecolesdifferentes.free.fr) ?

    Rares, les écoles alternatives sont souvent éloignées du domicile. Elles sont aussi trop chères : "je me suis mise à travailler pour payer l'école Steiner à ma fille, mais du coup je la voyais beaucoup moins, et elle n'en était pas si contente" témoigne cette mère d'une adolescente de 15 ans. N'ayant guère changé depuis le fondateur, leurs méthodes sont parfois perçues comme rigides, un peu dogmatiques alors que l'école publique semble davantage avoir fait une synthèse des apports des grands pédagogues. "Ces écoles restent un lieu spécial d'enseignement déconnecté des activités quotidiennes de l'enfant" fait remarquer un père. "Bien qu'elle soit différente, c'est toujours une école, avec des horaires, un nombre insuffisant d'adultes (pas choisis par les parents) pour donner de l'attention à tous les enfants, l'obligation de changer de lieu de vie plusieurs fois par jour, et des apprentissages pas choisis par les enfants" ajoute une mère de quatre enfants âgés de 9 à 15 ans.

    Ces parents ne font-ils pas vivre à leur enfant une projection de leur scolarité à eux?


    Beaucoup de parents évoquent en effet leur scolarité où prime dans leur souvenir l'ennui, parfois le rejet -mais pas toujours (notamment parmi les parents enseignants). Néanmoins cette projection existe chez tous les parents, y compris les scolarisants. "La question ne se pose pas en ces termes" juge un père, "a priori tous les parents veulent faire des choix libres et responsables".

    Quelle est leur situation par rapport à la loi?

    L'expression 'école obligatoire ' est toujours mise en avant lorsqu'on évoque l'école publique ("laïque et obligatoire"…) mais chacun sait que c'est l'instruction qui l'est en droit, conformément à la loi du 28 mars 1882.

    La loi du 18 décembre 1998 (complétée par un décret et une circulaire) précise les modalités de contrôle des familles par l'Etat, contrôle renforcé en raison de la lutte contre les sectes (http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/054000210/0000.pdf) : à partir des 6 ans de leur enfant, les parents doivent effectuer deux déclarations, l'une à la mairie (qui procède à un contrôle social), l'autre à l'inspection académique. Un inspecteur doit vérifier chaque année que "l'enseignement assuré est conforme au droit de l'enfant à l'instruction". "Le contrôle de l'instruction [ne doit pas se faire en référence] aux programmes en vigueur dans les classes des établissements publics ou privés sous contrat", ce qui devrait donner une certaine souplesse aux parents qui souhaitent suivre les sujets d'intérêt de leur enfant. L'objectif est que l'enfant non scolarisé atteigne à 16 ans "un niveau comparable dans chacun des domaines énumérés ci-dessus à celui des élèves scolarisés". "Lors du contrôle, il devra être tenu compte de l'âge de l'enfant, de son état de santé et de la progression globale définie et mise en œuvre par les personnes responsables, en fonction de leurs choix éducatifs, l'objectif étant nécessairement d'amener l'enfant, à l'issue de la période d'instruction obligatoire, à un niveau comparable à celui des enfants scolarisés dans les établissements publics ou privés sous contrat."
    (Source : www.education.gouv.fr/bo/1999/hs3/circul.htm#I.5)

    Même si la loi affirme que "cette instruction obligatoire est assurée prioritairement dans les établissements d'enseignement", les parents ont ainsi le sentiment "d'avoir la loi pour [eux]", et trouvent dommage que la visite des inspecteurs, peu au fait de cette loi méconnue, puisse parfois mal se passer. Lorsque la famille suit les programmes de façon scolaire, le contrôle se déroule bien : "malgré le stress, j'aime bien savoir où en sont mes enfants par rapport aux enfants de leur âge ; de plus, le satisfecit donné par l'inspecteur a été une récompense motivante de nos efforts" raconte une mère. Dans le cas de familles qui suivent les questionnements de leurs enfants, le contrôle peut mettre au jour des incompatibilités de vision du monde. Certains s'adaptent avec regret : "l'arrivée des contrôles plus systématiques à partir de 1998 a altéré nos relations avec les enfants" témoigne cette mère de quatre enfants de 9 à 17 ans. "Il a fallu que je les presse pour qu'ils produisent des travaux scolaires à présenter, alors qu'ils avaient toujours été moteurs de leurs apprentissages jusqu'alors". Enfin, certaines familles doivent aller jusqu'au procès afin de faire valoir leurs "choix éducatifs" pour reprendre les termes officiels.

    Pour finir, "personne ne vérifie les conditions de vie des enfants scolarisés, la visite sociale est humiliante dans son principe" estime un père dont la visite s'est pourtant très bien passée. "Les inspections a priori insinuent que nous sommes des parents irresponsables", s'agace un autre père.

    Et la socialisation? Ces parents n'ont-ils pas l'impression d'isoler et de marginaliser leurs enfants?

    "Ce sont de nouveau des craintes de scolarisants, qui reflètent et entretiennent le mythe de l'école obligatoire en France ; mais ces questions sont bien éloignées du vécu des parents ayant fait un autre choix" dit un père.

    Les enfants non-scolarisés fréquentent la plupart du temps de nombreuses activités extra-scolaires, rencontrent régulièrement d'autres enfants non-scolarisés (malgré les distances à parcourir). Les parents constatent néanmoins qu'un enfant ne demande pas de lui-même des contacts quotidiens pendant 8 h par jour avec d'autres enfants.

    Certains critiquent la socialisation de l'école, basée sur la fréquentation toute l'année d'un groupe identique de pairs du même âge, où "socialisation semble signifier en fait que l'enfant sait se soumettre aux règles d'un groupe qu'il n'a pas vraiment choisies", et où ces relations sont perçues comme potentiellement violentes. "La vie d'un adulte ne se résume pas à la fréquentation d'un groupe de 30 personnes du même âge, mais par l'insertion dans des réseaux de relations divers, commerçants, voisins, amis, famille, etc." raconte un père. Les enfants non-scolarisés intègrent par ce biais-là les codes de la société.
    Deux textes à ce sujet : www.lesenfantsdabord.org/socialisation.htm et http://cise.asso.free.fr/pages/page%20question%20socialisation.htm  

    La prédominance de l'école conduit assurément à une certaine marginalisation de ces familles. Le point commun entre les parents rencontrés est qu'ils ne craignent pas cette marginalisation, même s'ils en souffrent. Ils se sentent intégrés à maints autres égards, ou alors assument d'autres choix comme un regard plus "naturel" sur la santé ou une "simplicité volontaire" liée à leur approche écologique et/ou leurs revenus modestes.

    Cette marginalité est une spécificité française. Aux Etats-Unis où les homeschoolers représentent 5% des enfants (1,5 % en Grande-Bretagne), il y a toujours des voisins qui font ce choix, il est donc facile de constituer des petits groupes d'enfants afin de bénéficier de l'émulation du groupe. Ces deux millions d'enfants non-scolarisés constituent un marché : les supports sont nombreux et variés, il existe de multiples activités sportives et culturelles aux heures de l'école. Les grandes universités offrent même un cursus spécial d'entrée pour les homeschoolers. Comme cette option est courante, et connue, le choix de l'école est d'ailleurs davantage conscient.

    Comment cela se passe-t-il tous les jours?

    Cela dépend des choix des parents, selon qu'ils aient inscrit leur enfant dans un cours par correspondance de type Cned ou non. Les témoignages convergent sur le temps de travail plus réduit à la maison qu'à l'école "puisqu'il n'y a plus le temps de l'installation, des rappels à l'ordre" et puisque "avec son enfant on s'adapte à sa façon d'apprendre".  Le travail se fait souvent le matin, l'après-midi étant alors consacré à des activités artistiques ou sportives.

    La plupart des parents transmettent des informations en vivant au quotidien avec leurs enfants, à l'occasion de la confection ou du découpage d'un gâteau, du jardinage, d'émissions télévisées, de vision de séries en anglais, de lectures familiales de romans, de visites locales, de voyages plus ou moins longs. Beaucoup proposent des thèmes, dans une interaction fine entre parents et enfants : "ils me font confiance sur les choix des thèmes que je leur propose" précise une mère, qui poursuit : "on est tous en situation d'apprentissage, c'est jubilatoire".

    Une fois que l'enfant sait lire (avec ou sans méthode particulière), le parent peut l'aider à trouver des réponses aux questions qu'il se pose, en l'inscrivant à la bibliothèque ou en s'assurant de… la qualité de la connexion à internet.  

    Comme nous l'apprend ce passionnant témoignage d'apprentissage autonome (www.lesenfantsdabord.org/courtois_intro.htm, notamment pages III et suivantes) : "un enfant libre maîtrise […]  son processus d'apprentissage. Il va refuser l'aide ou l'information qui ne lui est pas utile sur le moment, faire un nombre important d'essais et d'erreurs jusqu'à parvenir à ses fins, créer ses propres situations d'apprentissage, poser des questions extrêmement précises dans l'attente de réponses tout aussi précises." D'où l'importance d'un entourage confiant et non-jugeant : "Le jugement ou la tentative d'aide pleins de bonnes intentions mais non demandés par l'enfant vont remettre en question pour lui la validité même de son fonctionnement, et le faire douter de ses capacités à gérer son apprentissage. […] Libre, il va se révéler très exigeant et perfectionniste, mais ses jugements sont exempts de notion de valeur : il sait qu'une erreur est une façon d'évoluer vers une réussite, et n'est pas un échec. Il sait que l'ignorance d'une donnée signale un besoin d'information et de recherche et n'est pas une preuve d'insuffisance."

    Comment ces jeunes feront-ils pour les apprentissages plus formels? Ne faut-il pas un peu forcer quand même à un moment donné pour les chapitres les plus rébarbatifs? Les tenants du homeschooling mettent en avant leur enthousiasme et leur créativité pour présenter aux enfants les aspects des programmes les moins plaisants. Les parents "unschoolers" répondent que l'enfant accèdera de lui-même à des apprentissages plus formels, par exemple en mathématiques, le jour où ces connaissances lui seront utiles dans un projet motivant ; ou encore…si ces sujets lui plaisent (et on a rencontré beaucoup d'enfants amateurs de mathématiques!). Sinon, "souffrir pour acquérir ces apprentissages ne me parait pas utile, d'abord car on les oublie complètement s'ils ne servent pas ; et si à 30 ans on en a besoin, c'est beaucoup plus intéressant et agréable de les acquérir à ce moment-là", précise un père de trois enfants.

    N'est-il pas inconfortable pour un parent d'être professeur de son enfant? De devoir punir son enfant s'il n'a pas fait son travail ou s'il a perdu ses affaires? Beaucoup de parents interrogés réfutent la notion de "punition", y compris dans leur éducation en général. "Si l'enfant est laissé moteur de ses apprentissages, il n'y a plus de notion ni de récompense ni de contrainte". Pour les enfants guidés par leurs parents ou par un cours par correspondance, les parents tiennent à assurer une relation de confiance avec leurs enfants.

    Quel avenir pour ces enfants?

    Pour certains enfants en difficulté, l'année sans école sera comme une respiration afin de se réconcilier avec eux-mêmes, retrouver confiance en eux, ne plus subir l'école mais y aller par choix.

    D'autres souhaitent intégrer le système en seconde, pour connaître l'expérience d'une vie de classe. Les débuts sont parfois décrits comme difficiles, notamment pour les travaux en temps limité et le rythme très soutenu : "je n'avais plus le temps de réfléchir à ma vie" dit ainsi cette jeune fille de 16 ans.

    Certains commencent des études après avoir passé le bac en candidat libre. D'autres apprennent un métier par apprentissage.

    L'influence d'internet

    Le choix de ne pas scolariser est un phénomène en augmentation, notamment en raison du web : nombreux sont les forums qui en parlent, les listes de discussion qui rassemblent ces familles en quête de contact et d'échanges, les associations qui informent : notamment 'Les enfants d'abord' www.lesenfantsdabord.org et CISE (Choisir d'instruire son enfant) http://cise.asso.free.fr. Les parents non scolarisants de 2005 sont bien moins isolés que leurs aînés.

    Qu'implique ce choix par rapport aux valeurs de l'école républicaine?

    Mixité sociale et citoyenneté
    Ces enfants restent toujours dans leur milieu : la non-scolarisation est-elle le "dernier ghetto des riches"? Non si l'on considère leurs revenus monétaires : certes il faut que la famille puisse vivre sur un seul salaire, ou deux demi-salaires, mais les revenus de ces familles sont moyens ; elles ont fait en sorte de réduire leurs dépenses, souvent par exemple en quittant la région parisienne (beaucoup de familles vivent à la campagne). Leur richesse est surtout une richesse en temps, en temps libre et en temps non minuté. "Richesse" aussi en assurance pour faire face à la pression sociale, assurance liée à un certain capital culturel.

    Ces parents se font souvent qualifier d'égoïstes car ils retirent leur enfant au lieu de vouloir améliorer le système de l'intérieur. Certains répondent qu'il est illusoire de vouloir changer l'école à l'échelle d'une famille et qu'ils ne veulent pas "sacrifier" leur enfant au nom de beaux principes. D'autres mettent en avant le caractère inégalitaire de l'école, l'importance de la reproduction sociale actuelle du système scolaire avec l'endogamie des élèves des grandes écoles et la relégation des élèves des lycées professionnels. Les accusations d'élitisme existent de part et d'autre…

    Universalité
    "Tout le monde ne pourrait pas faire votre choix", s'entendent souvent dire les parents non-scolarisants. Ceux-ci ne pensent pas que tout le monde devrait faire leur choix, ils souhaitent simplement être mieux tolérés et mieux compris. Certains proposent parfois des idées pour améliorer l'école, telle celle-ci : les élèves pourraient n'aller à l'école que 3h par jour (soit le matin, soit l'après-midi), de façon à ce qu'on puisse, à budget égal, proposer des classes de 12-15 élèves avec lesquelles les interactions enfants-enseignants seraient plus riches.

    Spécialisation des savoirs
    Comment des parents osent-ils penser qu'ils pourraient remplacer la diversité des talents et des compétences des enseignants? Ils n'ont pas cette prétention car ils se vivent comme accompagnateurs de la curiosité de leurs enfants. Ils aiment cette recherche commune de réponses aux questions que les enfants se posent –à la bibliothèque, dans une revue, sur internet, en rendant visite à un spécialiste ou à un professionnel, etc. 

    Efforts faits par les enseignants pour la bonne qualité de l'école
    Comment ces parents acceptent-ils de priver leurs enfants de tout ce qu'il y a de bien à l'école? "Ce que nous trouvons avec la non-scolarisation (une certaine autonomie, des apprentissages approfondis, une bonne estime et connaissance de soi) est plus important pour nous"  répond un père.

    Emancipation par rapport aux parents
    N'est-ce pas étouffant pour les enfants de toujours vivre sous le regard des parents? Avec des enfants et adultes toujours choisis par les parents? L'école ne libère t-elle pas les enfants des parents dans une certaine mesure? Une mère répond : "je pense qu'un petit enfant a besoin de la sécurité émotionnelle de la vie familiale. Lorsque les enfants grandissent, ils prennent de la distance par eux-mêmes, ne serait-ce que par le choix de leurs activités". "Mes filles voient beaucoup de monde, elles dorment souvent chez des copines scolarisées ou non-sco, leurs amies viennent régulièrement passer quelques jours chez nous" raconte une mère de deux filles de 8 et 12 ans.

    Ces parents non-scolarisants ont, à l'inverse, plutôt l'impression que l'école sert surtout à … libérer de nombreux parents de leurs enfants. "Calculant le bonheur par le taux de croissance du PNB, notre société occidentale moderne sépare les parents (qui doivent travailler) des enfants qui doivent être gardés, et le sont finalement correctement par l'école, étant donné le budget alloué", estime une mère de trois enfants.

    Préparation à la vie d'adulte
    "Vous ne voulez pas préparer vos enfants aux difficultés du monde des adultes? La compétition, la hiérarchie, le jugement des chefs sont des valeurs de la société actuelle auxquelles on ne peut se soustraire". Certains parents répondent que si, qu'eux-mêmes vivent sans rapports de force dans leur vie quotidienne, dans leur cercle amical et professionnel.

    Ainsi, le témoignage de ces familles non-scolarisantes offre comme un portrait en négatif de l'école. L'existence de cette possibilité interroge, notamment sur la faible place des parents dans notre système éducatif : il est significatif que malgré les inconvénients de l'isolement, ces familles préfèrent quand même se passer de ce que l'école peut apporter.

    Claudia Renau
    claudia@parisbalades.com
    juin 2005, modifié décembre 2005
    (Toutes critiques et suggestions bienvenues)


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  • Bonjour,

     Nous avons 5 enfants :

    deux adultes qui ont fait toute la scolarité habituelle,

    un de 18 ans qui a été à l'école de 3 à 6 ans

    et deux qui ne sont jamais allés à l'école.

    Nous avons retiré notre troisième à cause de problèmes à l'école.

    Nous n'y avons jamais mis les deux derniers à cause de l'amélioration de la qualité de vie constatée avec le troisième après qu'il n'a plus été à l'école et aussi de la qualité supérieure de l'éducation acquise par l'enfant après qu'il ait quitté l'école (je ne lui donnais pas de leçons; il lisait, on discutait).

      Nous avions de quoi comparer. 

     Je suis convaincue maintenant que si un enfant n'est pas obligé d'aller à l'école, il ferait mieux de rester à la maison.

     Bye,


     Anne

     



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